L'agroforesterie au secours de la forêt équatorienne
Freiner la déforestation amazonienne tout en améliorant les conditions de vie des populations autochtones ? C’est le pari dans lequel s’est lancée l’association Ishpingo, partenaire de Klorane Botanical Foundation en Équateur, en misant sur l’agroforesterie, la formation et la sensibilisation avec les fermiers Kichwas.
Décryptage par Micke Science !
Micke Science* vous explique comment l'ONG Ishpingo combat la déforestation et le dilemme de la pauvreté en Équateur. Face à l'orpaillage destructeur, des familles locales trouvent une alternative durable : l'agroforesterie ! Avec l'aide de Klorane Botanical Foundation, Ishpingo transforme des terres peu productives en forêts nourricières. Ces pratiques vertueuses permettent la reforestation et l'autosubsistance, tout en préservant la biodiversité unique de l'Amazonie et en assurant un avenir économique plus stable pour les communautés locales.
Un engagement pour la nature et pour l'Homme !
Micke Science, créateur de contenu en vulgarisation scientifique
Forêt vs agriculture
Avec plus de 50% de son territoire recouvert par la forêt amazonienne, l’Équateur est aux premières loges des problématiques liées à la déforestation. Hotspot de biodiversité, le pays perd entre 1,5 et 2% de son couvert forestier chaque année : l’effet combiné de l’urbanisation, de l’exploitation pétrolière et de l’extension des terres agricoles. Mais pour les habitants des régions amazoniennes, la déforestation est un mal nécessaire : dans ces zones reculées, l’agriculture est généralement le seul ressort économique et les fermes ont besoin de prendre de plus en plus sur la forêt pour soutenir le développement de la population.
Pourtant, il existe un autre mode de subsistance qui ne nécessite pas d’opposer terres agricoles et couvert forestier : l’agroforesterie. Depuis plusieurs années, l’association Ishpingo travaille main dans la main avec les fermiers des communautés Kichwas pour développer une agriculture capable de préserver les écosystèmes et les modes de vie. Ces descendants des peuples Quechuas des Andes forment une communauté de près de 100 000 personnes en Amazonie équatorienne qui repose sur une économie essentiellement agricole.
Restaurer et diversifier
L’agroforesterie c’est le fait d’associer sur une même parcelle une production agricole et des plantations d’arbres. Reposant sur le principe du co-bénéfice, l’agroforesterie est une méthode vertueuse de gestion de l’espace et des ressources. Les arbres favorisent le maintien de la biodiversité nécessaire à la protection et au développement des cultures. Ils jouent aussi un rôle important dans le bon état du cycle de l’eau et aident à fixer les sols et à en améliorer la fertilité. Un gagnant-gagnant pour peu que l’on accepte de céder un peu de terrain !
Les plantes amazoniennes à la rescousse
C’est tout l’enjeu du travail de l’association, soutenu par Klorane Botanical Foundation depuis 2021 dans le cadre d’un partenariat de six ans. Ishpingo accompagne les fermiers kichwas dans l’évolution de leurs pratiques par des actions ciblées de formation et de sensibilisation, et la mise en place de pépinières communautaires. Pour garantir une reforestation durable et de qualité, les espèces sont choisies avec soin : acajou à grandes feuilles (Swietenia macrophylla), chuncho (Cedrelinga cateniformis), guayacán (Tabebuia sp.), les fermiers ont le choix entre une quarantaine d’espèces indigènes en voie de disparition, parfaitement adaptées aux conditions amazoniennes. De nombreuses essences fruitières et médicinales sont aussi sélectionnées pour permettre aux kichwas de diversifier leur alimentation et leur production, ainsi que du bois d’œuvre pour l’artisanat et la construction. 15 essences différentes minimum sont plantées par parcelle pour favoriser la diversité et la résilience de l’écosystème restauré.
Une méthode concertée et communautaire
Les participants sont d’abord consultés pour évaluer les capacités de leur parcelle et déterminer la meilleure feuille de route. L’agroforesterie s’adapte aux conditions et aux objectifs : les plants peuvent être disséminés au milieu des cultures ou former une délimitation arborée selon l’espace disponible. Un plan à long-terme est établi avec chaque fermier pour sélectionner les cultures de subsistance temporaires qui pourront ensuite être remplacées par des espèces ombrophiles une fois le couvert forestier reconstitué. Des pépinières communautaires sont créées, qui permettent de disposer de plants de qualité en quantité suffisante et servent de support de formation.
Transmission de savoir-faire et sensibilisation
Chaque année, près de 25 familles font l’objet d’un accompagnement poussé. Collectivement, les fermiers sont formés aux techniques de gestion et d’exploitation de pépinières. Individuellement, ils reçoivent une formation aux techniques agroforestières pour gérer au mieux leur parcelle : entretien, gestion de l’ombrage, rotation des plantations, préservation de la biodiversité, gestion des nuisibles mais aussi récolte et transport des fruits, transformations médicinales ou utilisation du bois d’œuvre.
Les nouvelles générations sont elles aussi associées à ce projet communautaire avec des activités intégrées aux cursus scolaires toute l’année. Chaque année, une école est formée aux principes et enjeux du développement durable. Les élèves apprennent à reconnaitre et prendre soin des espèces locales lors de sorties sur le terrain. Une pépinière et un arboretum sont mis en place dans l’école, et les enfants ramènent des plants de fruitiers dans leurs familles.
Identifier de futures sources de revenus
Dans un objectif de diversification de l’économie des kichwas, Ishpingo et Klorane Botanical Foundation ont amorcé un travail d’identification de plantes locales susceptibles d’être transformées et commercialisées pour dégager de nouvelles sources de revenus pour la communauté. La recherche sur le développement de ces futures filières durables portera sur des huiles essentielles, gommes, résines et autres ingrédients.
“Notre travail est de convaincre les agriculteurs de préférer l’agroforesterie à la monoculture. C’est un effort multigénérationnel qui engage toute la communauté. La première brique est donc culturelle. Ensuite vient la transmission de connaissances et d’outils pour faire en sorte que cette transformation soit durable dans le temps long qui est celui de la reforestation.”
Antoine Vullien, co-fondateur de l’association Ishpingo
Nos partenaires
Créée en 2005, l'association Ishpingo est une Organisation Non Gouvernementale française et équatorienne. Elle a pour objectif l’amélioration des conditions sociales, économiques et environnementales des populations natives de l'Amazonie, la reforestation et la préservation de la biodiversité grâce au développement de projets agroforestiers.
Qu’est-ce que l’agroforesterie ?
Des arbres et des animaux au milieu des cultures ? Un joyeux petit monde qui s’entraide ! (re)découvrez les principes de cette pratique qui encourage la biodiversité.